Au ST, le phénomène
ultra n’est pas en reste. Il a été créé en 2002,
sous l’appellation
«Bardo Boys». Cheminement d’un groupe… pas comme les autres.
C’est à l’occasion de
la Coupe arabe disputée en Arabie Saoudite en 2002 que cette genèse s’est
cristallisée. Deux des pionniers de ce mouvemenbt, M.D. et S.B., reviennent sur
cet acte de naissance: «A vrai dire, le groupe existait bien avant cette date,
mais il était dénué d’encadrement. Nous nous sommes inspirés des Ultras
italiens, avec un credo majeur, à savoir supporter inconditionnellement et
contre vents et marées notre club. C’était et c’est encore et toujours notre
seul aiguillon. Et petit à petit, le groupe s’est élargi et à partir de son
fief, le Bardo, il a connu des ramifications sous forme de cellules et autres
sous-cellules implantées un peu partout, notamment dans le Grand-Tunis, à Den
Den, Manouba, Ariana, Ennasr, la Marsa…».
Comme pour chaque
groupe, l’appellation est loin d’être gratuite. Nos invités éclairent notre
lanterne à ce propos: «En effet, rien n’est à mettre sur le compte du hasard.
Concernant le premier mot, «Bardo», l’interprétation coule de source, allusion
au fief de notre club, à ses racines, à son histoire. Le second boys, en
anglais, comme c’est le cas pour les autres groupes, renvoie aux enfants du ST,
à la dimension filiale, au cordon ombilical qui se cimente chaque jour
davantage».
Totale reconsidération
de l’apport du public
Sur un autre plan, tout
un chacun sait que la mission d’un groupe dépasse le fait de supporter son
club. En quoi consiste-t-elle chez les boys du Bardo ? M.D. et S.B. précisent à
l’unisson :»Ce à quoi nous nous attelons en premier lieu, c’est d’accroître au
maximum, le nombre de supporters par le truchement d’un travail de
sensibilisation à partir de la base. Par ailleurs, «Bardo Boys» constitue une
vraie famille. Nous sommes, en effet, toujours ensemble, la main dans la main.
D’ailleurs, chaque membre est détenteur d’une carte où il y a l’inscription
«membre della famiglia». Par ailleurs, et vu qu’il revient à notre groupe
d’organiser les «dakhlas» (spectacle suspendu depuis quelque temps), d’acquérir
les drapeaux… il nous incombe d’amasser de l’argent. Celui-ci
provient de la contribution des membres et sympartthisants, de la vente
d’articles divers, des cartes de membre…»
Venons-en maintenant à
la philosophie sous-jacente à ce véritable mouvement. Pour le large public
sportif, le mot «Ultra» ne peut avoir qu’une seule acception, celle qui renvoie
à l’extrémisme, au chauvinisme, au radicalisme, au hooliganisme pour ainsi
dire. Cette forme de jusqu’au-boutisme dévastateur générateur de funestes
incidents, à l’instar de ceux du Heysel… Une vision des choses que les représentants de Bardo
Boys réfutent en bloc.
Explication: «Il
s’agit, en effet, d’une approche tout à fait erronée. C’est qu’il n’y a pas
plus nobles et plus pacifiques que les Ultras. Leur présence au stade n’a
qu’une seule finalité, à savoir être derrière leur club. Ils sont là pour
soutenir leurs favoris s’époumoner et s’égosiller du début jusqu’à la fin d’un
match, le tout dans les règles de l’art. A cette fin, ils organisent tout un
spectacle, haut en couleurs. Et les exemples dans nos stades foisonnent pour
prouver que ce spectacle s’élève au niveau d’un art, un art multimensionnel au
vu de la diversité d’ingrédients qui en font partie. D’ailleurs, il y a des
gens qui se sont épris des groupes, parfois même plus que de leurs couleurs
préférées, allant au stade rien que pour admirer la féerie et la majesté du
spectacle qui s’offre à leurs yeux ébahis et émerveillés. C’est sous cet angle
uniquement qu’il faut appréhender le mot «ultra». Tous les dépassements, tous
ces actes de vandalisme n’ont rien à voir avec les Ultras et la noblesse, la
magnanimité de la philosophie qui préside à leur mission.
Tous les écarts de
conduite constatés dernièrement dans nos stades sont l’œuvre d’un groupuscule
d’irresponsables dont les actes n’engagent que leurs personnes».
Autant alors certifier
qu’une totale reconsidération de l’apport du public, toutes tendances
confondues, ce dernier étant, en dernier ressort, indissociable, est à prôner
urgemment. Les deux porte-paroles de Bardo Boys se veulent, à ce propos rassembleurs:
«Nous estimons que l’approche collégiale est à privilégier. En effet, le BD, le
comité des supporters et le groupe en question, Bardo Boys et aussi le deuxième
groupe du ST, Kaotic Group en l’occurrence, doivent unir leurs efforts, se
concerter pour agir en parfaite symbiose le jour du match. D’ailleurs, nous
avons proposé aux dirigeants stadistes de déléguer un membre de Bardo Boys pour
nous représenter lors des réunions officielles aussi bien du BD à préciser une
chose, c’est que tenons à notre totale autonomie, au niveau de nos idées, de
notre philosophie et de notre action. Nous sommes pour l’organisation commune,
la complémentarité, mais au plan des convictions, nous nous posons en
porte-à-faux à toute immixtion, à toute forme d’endoctrinement, attendu que
nous nous réclamons d’un total pacifisme. Tout un chacun n’a qu’à se remettre à
notre slogan «honneur et fidélité». L’honneur, eu égard au profond sentiment de
fierté qui nous anime vis-à-vis du passé glorieux et et mythique de notre club.
Et même si notre présent n’est pas aussi reluisant, notre amour envers le ST
grandit chaque jour encore plus («piu perdiamo, piu tiamo»). La fidélité, comme
en témoigne notre présence constante et assidue partout où se produisent nos
couleurs bénies et chéries».
Cela dit, la tentation
de revenir au phénomène des flammes est irrésistible. L’occasion idoine d’en
savoir plus, vu qu’il est étroitement lié à cette fameuse philosophie des
Ultras. Ce à quoi rétorquent nos interlocuteurs: «C’est, en effet, une vérité
irrécusable. Un Ultra sans flamme est pour ainsi dire, comme dénué de son
identité. Mais sachez qu’à l’origine, l’Ultra tient une flamme à la main
jusqu’à l’éteindre sur place. Cela fait partie du spectacle et n’a aucune
incidence préjudiciable. Toutefois, ce recours a été subitement interdit par la
loi, ce qui a été ressenti comme une grande frustration. Ce n’est que
subséquemment à cette déplorable mesure que le phénomène du jet de fumigènes,
celui de la flamme-parachute, est apparu, une sorte de riposte et de vengeance
que nous condamnons. A Bardo Boys, cette «mode» ne nous concerne pas et nous
n’y avons pas recours. Cela dit, l’image de l’Ultra doit être clarifiée et
surtout réhabilitée. Dans cette optique, les représentants des divers groupes
en Tunisie se concertent depuis un certain temps. C’est que nous constituons,
groupes de tous bords, EST, CA, ESS, CSS, ST…, une famille élargie. C’est que
nous défendons une même cause. Pour preuve, la charte de l’Ultra que nous avons
élaborée dans une totale symbiose. Nous aspirons à nous asseoir autour d’une
même table avec toutes les parties prenantes du sport en Tunisie, le ministère
de l’Intérieur, le ministère de la Jeunesse, du Sport et de l’Education
physique, le BF, les médias… Il y a des barrières à abattre, des préjugés à
éliminer et une image constructive à réhabiliter. Le tout converge vers une
seule finalité, l’intérêt du foot, et par extension du sport dans nos contrées.
La Tunisie sportive le vaut bien».
Aux acteurs de la vie
sportive d’en prendre acte, dans l’optique d’une action commune salutaire.
waw
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